Penser la crise des banlieues / Le contrat salam
Revue Annales. Histoire, Sciences sociales, n° 4-2006
Attentives à intervenir aussi sur le “ très contemporain ”, les Annales reviennent sur les événements qui se sont produits en France à l’automne 2005, et apportent leur éclairage dans le débat sur la “ crise des banlieues ».


De quelle crise la flambée de violence de l’automne dernier est-elle le symptôme ? Du modèle républicain d’intégration à la française ou de la société française elle-même, comme le souligne Dominique Schnapper ?

Pays d’immigration, la France voit ses capacités d’intégration marquer le pas ; dans une société minée par un chômage structurel de masse, les difficultés d’insertion sur le marché du travail avivent les frustrations et les rancœurs. Pour autant, la revendication des droits, dans la plus pure tradition républicaine “ à la française ”, c’est-à-dire dont l’État est le garant, n’est pas absente. C’est l’analyse que fait Robert Castel.
Ce qu’expriment aujourd’hui “ les jeunes ” des banlieues, ce que manifestent les explosions spontanées sur le modèle des “ émotions ” populaires que l’histoire a connues, serait une revendication plus qu’un refus : celle de participer aux droits promis ; une attente sociale, que les politiques publiques n’arrivent pas à combler. Paradoxe de la situation : l’expression, y compris violente ou désespérée, traduit d’autant plus l’incorporation du répertoire des droits que la discrimination négative vécue est plus forte.
R. Castel fait ici l’hypothèse que les jeunes d’aujourd’hui endossent le rôle que les vagabonds avant-hier, les prolétaires hier, avaient tenu : celui de groupes qui incarnaient l’altérité culturelle. Autant, sinon plus qu’un refus d’intégration, c’est une demande d’intégration à laquelle on assiste,  à laquelle la réponse ne saurait être que politique.

Une prise de recul est donc nécessaire. C’est ce que tentent Stéphane Beaud et Olivier Masclet, d’une part, Marc Gurgand et Éric Maurin, de l’autre. Les premiers choisissent une perspective générationnelle, mettant en rapport la génération des beurs, née dans les années 1960 et 1970, et celle des cités, née dans les années 1980 et 1990.  Les seconds, prenant plus de distance par rapport à l’événement, se donnent pour objectif de mesurer l’impact des politiques éducatives de démocratisation de l’enseignement secondaire et supérieur sur les revenus salariaux

Les sciences sociales ne peuvent se détourner de leurs responsabilités : soumettre l’événement et les discours à l’épreuve de la critique, offrir des analyses contextualisées qui résistent, croiser les perspectives et déplacer les unités spatiales et temporelles considérées.
DESCRIPTIF
  • Parution : 2006
  • Revue : Annales. Histoire, Sciences sociales
  • Numéro : 4-2006
  • ISBN EHESS : 2-7132-2086-6
  • ISBN Autre éditeur : 978-2-220-092100-2
  • Prix : 17.00€